Cheikh Oumar Diagne : « Je crains que les Sénégalais ne soient des étrangers chez-eux d’ici deux ans »

by amadou

Alors qu’il est de nouveau convoqué à la DIC, ce vendredi, le Professeur Cheikh Oumar Diagne s’est livré à  un exercice qui va déplaire : donner son avis dérangeant sur les questions d’actualité du moment. Ousmane Sonko, Adji Sarr, assemblée nationale, inondation, Dantec, l’homme n’élude aucune question. Le spécialiste de finance islamique parle également d’autres sujets tels que la hausse continue des prix et affiche son inquiétude sur la question des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM). 

Des cas de viol secouent la toile. On accuse même un responsable politique d’être mêlé. Quel regard portez-vous sur cette affaire ?

Concernant l’image de nos hommes politiques dans ce pays, c’est un autre débat. Je parle de probité morale ou intellectuelle. Les personnes qui ne sont pas clean  aiment faire de la politique. Mais peu de gens vertueux se sont lancés dans cette scène. Je ne m’étonne pas de voir certaines pratiques, des antivaleurs, des comportements qui sont, en tout cas, contraires à nos traditions, nos cultures et nos croyances. Pour l’instant, je ne peux pas dire que cet homme politique a violé la femme parce que je n’ai pas été témoin.

“Il n’y aura pas de procès Sonko-Adji Sarr”

Et l’affaire Adji Sarr Sonko qui jusque-là n’a pas connu son épilogue alors que le leader du Pastef a déclaré sa candidature pour les élections présidentielles de 2024 ?

A mon humble avis, l’affaire Adji Sarr-Sonko est un non évènement. Je ne la suis plus parce que l’affaire a été claire depuis longtemps. Il y a eu beaucoup de journalistes d’investigation qui ont fait des enquêtes. Ils ont livré beaucoup de preuves qui ont fuité des services de l’Etat. Beaucoup  de  gens ont une idée claire de ce qui s’est passé  et comment ça s’est passé. Je peux citer les journalistes, Pape Alé Niang, Babacar de Kéwoulo. Je peux citer beaucoup de journalistes que je respecte  qui ont donné les secrets de cette affaire-là. Je ne me fais plus de doute. C’est un coup foiré. C’est un complot qui a été mis en œuvre pour empêcher Ousmane Sonko de dérouler son plan politique. Cette affaire-là va être classée parce que je ne pense pas qu’il y aura un procès. Même les grands défenseurs d’Adji Sarr commencent à se retirer du dossier. Je vois les Françoise Hélène, les Gabrielle Kane, toutes celles qui étaient derrière Adji Sarr pour la défendre commencent à se retirer.

Depuis les fameuses sorties de Mollah Morgan et tout ce qui s’en est suivi, ces personnes-là se sont rétractées et ont laissé le dossier en l’état.

“Je milite pour l’Islam au Sénégal. Je suis islamiste convaincu”

Quelles sont vos relations avec Ousmane Sonko ? Vous semblez l’apprécier…

Je me retrouve à 90% dans le discours de Sonko. Peut-être, moi et Sonko, nous ne sommes pas sur la même longueur d’onde sur une question qui est la question du modèle dans lequel, le Sénégal doit évoluer. Je milite pour l’islam au Sénégal. Je suis islamiste convaincu. C’est la seule chose que je ne vois pas dans les programmes d’Ousmane Sonko. Mais sa vision sur la gouvernance de ce pays, sur l’assainissement de l’administration, sa vision sur le colonialisme qu’il faut mettre à terme ,je partage entièrement les positions de Ousmane Sonko.

« Ousmane Sonko présente le meilleur profil parmi les présidentiables  »

Donc, pour moi, actuellement dans la classe politique sénégalaise, pour ceux qui sont présidentiables, ceux qui veulent être Président de la république à l’heure actuelle, je trouve que Sonko est le meilleur profil. C’est le meilleur candidat pour le Sénégal. Ceci ne fait pas de moi un pro Sonko parce que je suis très lucide. Je suis très rationnel dans mes relations avec Sonko. Je ne vénère pas Sonko. Il n’est pas aussi un Messie pour moi. Nous étions dans ces combats avant Sonko. Et, s’il  venait d’abandonner ce combat, nous continuerions à les mener.

“Farba Ngom n’a aucune compétence, ni de connaissance. Il  n’a pas de diplôme. Dans un État sérieux, il  ne devrait pas avoir droit à la parole”

L’honorable député Farba Ngom a récemment fait une sortie pour demander à Ousmane Sonko d’édifier l’opinion publique sur cette affaire de viol. Il a aussi promis  d’emmener Adji Sarr à la Mecque. Qu’en pensez-vous ?

Cela me fait rire. Je ne trouve pas que Farba est honorable. Le vocable ou bien l’attribut « Honorable » n’est pas à la portée de tous les députés. Il y a certains députés qui ont trouvé l’honorabilité à travers leur posture, leur démarche et les combats qu’ils ont menés au sein de l’hémicycle pour le bien des Sénégalais. Il y a d’autres qui n’ont fait que profiter des privilèges de l’Assemblée sans pour autant porter aucun combat sérieux. Et, Farba fait partie de ces députés-là qui dans un pays sérieux n’aurait même pas été chef de quartier  à fortiori être député. Quand, il appelle Ousmane Sonko à régler le problème d’Adji Sarr, il montre carrément que c’est un ignare.  Il  montre ses  limites par rapport à la marche de la justice et  de la procédure en matière de viol, correctionnel ou criminel.

S’il dit qu’il va l’emmener à la Mecque, c’est bien. Je dis que Farba lui-même doit aller à la Mecque pour mieux se rapprocher de ce que l’Islam recommande. Quelqu’un qui garde des milliards dans sa maison doit nous inciter  à réfléchir.

J’aurai conseillé à Farba d’essayer de se concentrer sur sa spiritualité avant d’aider les gens à aller à la Mecque. C’est lamentable quand même de voir des personnes comme Farba sortir pour répondre à des adversaires politiques. Cela montre quel est le niveau du débat politique au Sénégal. Farba n’a aucune compétence, ni de connaissance. Il  n’a pas de diplôme. Dans un État sérieux, il  ne devrait pas avoir droit à la parole. Si ce sont des gens comme Farba qui animent le débat politique, au nom d’une coalition qui est présidentielle, je présente ‘’mes condoléances’’ à la coalition BBY.

“Mon rêve : Mamadou Lamine Diallo, président de l’Assemblée nationale”

On va vers une nouvelle assemblée avec de nouvelles têtes. Quel  serait, selon vous, le bon profil pour être président de  l’Assemblée nationale ?

Je trouve que l’Assemblée nationale aurait de la chance d’avoir quelqu’un comme Mamadou Lamine Diallo comme président. C’est un homme intègre, très posé, un homme structuré. C’est un homme qui n’est pas dans la majorité présidentielle, qui n’est pas dans l’opposition radicale. Il est très averti sur des questions économiques, monétaires et stratégiques. Je trouve que l’expérience qu’il a en tant que député depuis des années peut faire de lui, le meilleur profil comme Président de l’Assemblée nationale. Je rêve qu’il le devienne et surtout je souhaite qu’il le devienne parce que c’est un homme intègre. Il est très averti sur les questions liées aux valeurs, à la morale. Nous avons besoin d’hommes politiques vertueux, honnêtes.

“Nos députés ont livré le Sénégal dans les griffes du nouvel ordre mondial”

Des gens sonnent l’alerte sur les OGM (organismes génétiquement modifiés) . Une loi sur ces organismes a été votée, il y a quelques semaines. Quelle analyse faites-vous de ce texte ?

C’est une loi criminelle que nos députés ont votée lors de la législature passée. Ils ont livré le Sénégal dans les griffes du nouvel ordre mondial qui voit en l’Afrique, un danger potentiel. La population africaine est une problématique dans toutes les grandes sphères européennes, américaines. Il y a des dirigeants européens, américains qui soutiennent que l’Afrique a des problèmes avec sa démographie.  C’est le cas de Sarkozy, de Tony Blair et bien d’autres qui indexent la population africaine comme la cause de la pauvreté et du recul du continent africain. Donc, ces OGM  vont participer à détériorer la santé des populations africaines surtout celle des Sénégalaise.

“On veut transformer le Sénégal en laboratoire de production, de commercialisation, de recherche de produits OGM”

 Ces OGM vont rompre nos égalités et nos équilibres écologiques. Ils vont participer à l’érosion des sols, à la contamination des nappes phréatiques, à l’éclosion des cancers chez les jeunes et chez les personnes moins jeunes, à des troubles et à des crises sanitaires. En somme, nous devons craindre les OGM. On veut transformer le Sénégal en laboratoire de production, de commercialisation, de recherche de produits OGM.

“Nous sommes dans un pays qui est maintenu dans un « état de paix » grâce à des prières sans doute. Je crains un soulèvement populaire”

Actuellement, on assiste à une flambée des prix des denrées de première nécessité.  Qu’est-ce que cela traduit ?

Cette flambée des prix nous renseigne sur le manque de leadership du Sénégal dans la gestion des affaires domestiques. En réalité,  c’est l’absence de souveraineté en matière alimentaire, politique et dans tous les domaines.

Quand on dépend de l’extérieur et d’autres marchés, quand on ne parvient pas à respecter la loi et à assurer le contrôle des prix, nous pouvons avoir que ces résultats.  Il y a des  lobbies ou bien même des groupements sont assez forts pour pouvoir face à l’Etat.

Nous sommes devant un chaos qui ne dit pas son nom. Aujourd’hui, tous les secteurs au Sénégal sont rouges. Nous sommes dans un pays manifestement qui est maintenu dans un « état de paix » grâce à des prières sans doute. Je crains un soulèvement populaire. Je pense que dans la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui, une révolution populaire n’est pas à ignorer. C’est une possibilité. Les gens sont à bout.

“Dans le dossier Dantec, il y a des magouilles et un grand   complot que le temps va dévoiler”

Aujourd’hui, on parle de la reconstruction de l’hôpital Le Dantec dont une partie doit être vendue. Quel est le point de vue de Cheikh Oumar Diagne par rapport à cette problématique ?

Je nourris un sentiment de désolation et de chagrin. La question de l’hôpital, Le Dantec, est un déguerpissement. C’est clair. C’est un bradage organisé. Ils nous ont vendu un pseudo projet de réhabilitation de l’hôpital. Je trouve anormal que des travailleurs aient proposé des solutions rejetées par l’Etat. L’Etat avait promis ces terres à des partenaires étrangers. C’est une réalité. J’ai peur qu’à terme, d’ici au maximum 2 ans avant la fin du règne du Président Macky Sall que nous soyons étrangers chez-nous et c’est cela en réalité qui me fait mal.

 J’ai pu rencontrer les agents de l’hôpital Le Dantec. Ils ont été pris de court. Ces agents ont reçu cette information au même titre que tout le monde. En fait 90% des agents ne sont pas fonctionnaires. Ces derniers sont payés par l’Hôpital. Les services sont délocalisés sans un déploiement  convenable de ces non fonctionnaires. Il faut le dire, l’Etat a fait montre d’amateurisme et d’inconscience. Qu’est-ce qui peut expliquer cet empressement. L’Etat pouvait bel et bien décliner un plan d’aménagement sur une période pouvant aller jusqu’à la fin de 2022. Il fallait une délocalisation graduelle accompagnée par un redéploiement des agents. Derrière, il y a des magouilles et un grand   complot que le temps va dévoiler.

Le Sénégal est de nouveau confronté aux inondations et a déclenché un nouveau Plan Orsec. Le ministre de l’Intérieur parle, de son côté, de phénomène mondial pour justifier cela…

Le plan Orsec est un plan de secours pour un pays qui n’a pas de programme. Mais nous avons un Programme décennal que nous avons mis en œuvre et le Président, dès 2016, avait proclamé que la question des inondations était définitivement réglée au Sénégal. Donc  je trouve que  le plan Orsec est un échec comme l’ensemble d’autres plans qui sont des gouffres financiers.

 Je m’interroge  sur les  milliards que le Président Macky Sall annonce avoir mis dans la gestion des inondations depuis son arrivée au pouvoir en 2012. Il faut auditer ce programme. Au Sénégal, en plus des inondations, nous avons un problème d’assainissement et d’aménagement du territoire.

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